DURANT L’APOCALYPSE, LE BAR RESTE OUVERT Sortir du nucléaire, ce week-end, cela aurait mis en péril la future place de travail, dès 2018, de Doris. Le peuple s’est montré solidaire – c’est bô – quitte à le payer de sa poche sous peu. Ben oui…

Le temps de deux ou trois sondages – ceux qui prévoyaient 58 % de oui à la sortie du nucléaire – Doris a dû avoir le trouillomètre à 0 % de batterie. Imaginez que les votes du 27 novembre misent sur les énergies renouvelables, comment allait-elle se recycler, elle ? On savait qu’à la fin de son mandat de Conseillère fédérale, deux ou trois grands groupes, producteurs d’électricité, lui réservaient un petit boulot sympa, comme avant, où elle siégeait au conseil de la Compagnie d’électricité du Laufenbourg.

En 2011, lorsqu’elle disait qu’il fallait sortir du nucléaire, elle savait de quoi elle parlait, notre Doris. Et, cinq ans plus tard – lorsque les néfastes retombées émotionnelles de Fukushima étaient un peu oubliées – elle avait eu le temps de potasser un peu plus le dossier. Débrancher aussi vite ? Mais quelle horreur ! Une cheffe du Département de l’énergie n’oserait jamais mettre des intérêts privés – les siens ou ceux de sociétés – avant ceux du citoyen souverain. Même Wikipédia la situe proche des « milieux pro nucléaires », c’est te dire son objectivité dans cet objet de vote.

On sentait, à Doris, que sa position sortait de son cœur – pas aussi radioactif que celui d’une centrale – que c’était du pesé, du réfléchi, du spontané. Un vote contraire aurait montré une force de persuasion aussi molle d’un kilowatt pompé sur du photovoltaïque un jour de neige.

Là, depuis une heure, le futur de Doris s’est dégagé. Aaaaaah quel bonheur que celui de savoir que son job de dans deux ans lui tend les bras, aussi noueux et musclés que ceux des braves Zelvètes des cantons bien primitifs. Régions qui, d’ailleurs, ont rejeté le plus massivement les propositions des Verts : Argovie à 63 %, Obwald et Nidwald à 65 % et Schwytz à 68 %. Magnifique, émouvant, attendrissant cette confiance envers Doris. Toi, qui a voté « non », craignant de ne plus avoir assez de courant pour recharger ton iPhone 7, si tu prenais un ch’tit container de déchets radiocatifs dans ton abri anti atomique? Oui, celui devenu inutile – mais jadis imposé par des autorités (avant Doris!) – qui savaient tellement mieux que toi comment te protéger…

Entre deux, tu peux aller acheter quelques cierges… tant que tes finances te le permettent. Certes, oui, mon gars, on sortira du nucléaire de façon calme et pondérée. Prie juste pour que d’autres choses ne sortent pas prématurément des centrales avant 2050! Au passage, il faudra investir un milliard pour que les centrales de Gösgen et de Leibstadt continuent à fonctionner. Quelque chose me dit que c’est sur TA facture d’électricité que cela retombera. Attends, tu vas rire… Si tu creuses un peu, tu t’aperçois que, derrière les actionnaires de ces centrales (genre Axpo), tu tombes sur des pouvoirs publics. Donc des cantons, donc l’argent de tes impôts. En résumé, ce 27 novembre 2016, tu as accordé le droit d’augmenter ta future note grâce à des capitaux que tu as toi-même fournis. Vulgairement, cela s’appelle se faire baiser trois fois. Alors, heureuse ? Autant que Doris ? J’en doute…

Joël Cerutti

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